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LE LIT DE DIAMANTS.

L’officier de quart voulut-il mieux voir ce qui se passait ou bien chercha-t-il à aider les poursuivants ? Cela on ne saurait le dire.

Toujours est-il qu’un projecteur étincela subitement à bord du navire, jetant sur Tril et sur les premiers rangs de ses agresseurs, un cercle éblouissant de lumière électrique.

La surprise immobilisa d’abord tous les adversaires, puis les assaillants comprirent que la clarté leur apportait un atout de plus. Leur victime leur apparaissait si nettement !

Avec une clameur féroce, tous bondirent en avant. Deux fois le revolver du gamin détonna, jetant au vent son claquement sec ; deux des ennemis s’arrêtèrent touchés par les projectiles ; mais les autres ne ralentirent pas leur course.

Pour la troisième fois, Tril éleva son arme.

Soudain, tous se figèrent en une immobilité de statues ; un sifflement aigu avait déchiré l’air, semblant descendre des profondeurs noires du ciel. Quelque chose passa avec la rapidité de la foudre : quelque chose, oui. Mais quoi ? Aucun ne le sut, car une rafale violente, subite, balaya le môle, la digue. Tous les assistants furent couchés sur le sol, comme fauchés par un cyclone, et quand, stupéfiés, contusionnés, ils se redressèrent, cherchant des yeux le gamin, ils ne l’aperçurent plus.

Le lampadaire montrait son fût légèrement courbé par le souffle de l’inexplicable ouragan ; les vitres abritant la flamme étaient brisées, arrachées de leurs montures métalliques, mais de Tril, plus la moindre trace.

Walter, Klobbe, Niklobbe, leurs alliés volontaires, se regardaient déconcertés. Aucun ne pouvait entrevoir la vérité.

Tril a été littéralement pêché par un filet descendu des nuages, et qui, on le devine, fait partie des apparaux de l’aéroplane de François. Balancé follement dans la poche de chanvre, qui s’est refermée sur lui après l’avoir happé, il a senti qu’on le hissait lentement vers le point d’attache du câble. Et bientôt il s’est trouvé debout sur le plancher de l’aéroplane, en face de Klausse actionné à la direction, en face de Suzan qui le considérait, les yeux baignés de larmes, l’air égaré par l’excès du bonheur. Ils ont un double cri. Ils se jettent dans les bras l’un de l’autre.

Le mécanicien, respectueux de cette affection sincère, paraissait ne rien voir. Il s’absorbait à la manœuvre.

Tril contait son odyssée nautique, son arrivée à Hambourg, la malchance qui l’avait jeté sur le chemin de Walter. Suzan disait ses angoisses durant les deux jours qui avaient suivi la réception de la dépêche de Hambourg…