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L’AÉROPLANE-FANTÔME

— Trêve de paroles inutiles. Ma volonté vous est connue. Je l’ai publiée dans tous les journaux d’Europe.

— Oh ! vous savez, je ne crois pas aux racontars de la presse.

— Soit. Voici ce que j’exige. Vous allez m’accompagner. Vous proclamerez l’innocence de François de l’Étoile ; vous confirmerez la véracité des dires que j’ai confiés au public. Mes affirmations amies peuvent laisser place au doute, votre déclaration adverse l’interdira à jamais.

— En résumé, interrompit Von Karch sans rien perdre de sa tranquillité, vous souhaitez que je donne aux tribunaux la possibilité de me juger, de me condamner. C’est quelque chose comme le bagne que vous m’offrez.

— François de l’Étoile a échappé à une injuste condamnation par le suicide.

— Ah oui ! je fais amende honorable. Votre générosité ne me pousse pas aux travaux forcés, mais au suicide. Tout à fait sensible à la gracieuseté ; seulement, souffrez que je n’en profite pas.

Et le doktor esquissant un geste violent, l’espion éclata de rire, en disant non sans peine, au milieu de son inexplicable hilarité :

— Ne vous emportez pas ! Ah ! ah ! ah ! vous allez comprendre.

Margarèthe, elle, fixait sur son père un regard effaré. Enfin, l’agent d’espionnage domina sa joyeuse exubérance.

— Je vous ai écouté avec politesse, Miss Veuve, dit-il posément. Je vous prie de m’accorder la même attention courtoise. Vous êtes un ennemi extrêmement dangereux, je le reconnais. Mais dans la conviction du triomphe, vous avez omis un instant de faire entrer en ligne de compte mes convenances personnelles ; je vous demande la permission de combler cette lacune.

Il y avait maintenant sur le visage du doktor un voile d’inquiétude. L’espion le remarqua, et d’un ton ironique :

— Je vois que la raison se réveille aisément en vous. Vous songez que je me suis désarmé à l’instant, et que pour agir ainsi, en face de vous qui maniez toujours votre… radiateur hertzien, il faut que j’aie la certitude… si, si, la certitude, le mot n’est pas trop fort, de vous amener à partager ma façon de voir. Voici donc les conditions que je mets à notre entente.

— Des conditions, gronda son interlocuteur, est-ce bien à vous d’en poser ?

— Je le crois, au surplus nous éluciderons ce point tout à l’heure. Je reprends l’exposé de ma volonté. Vous vous retirerez seul. Vous reviendrez ici dans une huitaine. Alors, nous retrouvant en face l’un de l’autre, dans cette même salle, je serai prêt à répondre à vos vœux.

Sur un geste du visiteur, il s’empressa d’expliquer :