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MISS VEUVE.

chasse cette pensée. Lui seul connaît le tréfond du cœur de Marga. Les autres, les comparses du drame, ne soupçonnent pas qu’elle s’est prise d’affection pour les captifs. Von Karch se dit ces choses, et cependant sa voix marque un frémissement quand il reprend :

— C’est bien, Pétunig, laisse-moi passer. Je veux me rendre compte par moi-même de la façon, dont mes… locataires se trouvent dans mon immeuble.

— Ah oui, les yeux de chat !

Et d’un ton quémandeur, le serviteur ajoute :

— Il n’y a que vous qui sachiez comment ça s’ouvre, les yeux de chat. Si, un jour vous êtes bien content de moi, vous devriez me permettre d’y regarder. Ce doit être amusant de voir les gens à travers un mur, sans qu’ils le soupçonnent.

— Je te le promets. En attendant, fais bonne garde.

L’espion s’est enfoncé dans le couloir, en grommelant pour lui seul :

— Brave Pétunig. Il se figure que je lui montrerai Marga esclave de son cœur, s’improvisant la providence des prisonniers.

L’étroit conduit marque des angles. Von Karch en a contourné deux, comptant à mi-voix. Au chiffre trente, il s’arrête :

— Trente pas, dit-il, c’est ici.

Un frottement sec bruit dans l’air. L’Allemand vient d’enflammer une allumette de cire. Il promène sa lueur sur la muraille. Une plaquette de cuivre apparaît, appliquée sur la pierre.

Elle a à peine deux centimètres de côté, et sa surface rectangulaire est trouée, en son milieu, par une petite fente en zigzag.

Tout auprès une pince minuscule de laiton est fichée dans la paroi. Von Karch introduit l’allumette entre les deux branches de la pince, et les mains libres désormais, il fouille dans sa poche, en tire son portefeuille, ce même carnet que Tril lui a si adroitement emprunté à Londres, et sort de la pochette une mince lamelle d’acier nickelé, laquelle reproduit les sinuosités de la rainure murale.

Il l’y introduit, exerce une pesée. La plaque de cuivre cède, sort de son alvéole, entraînant avec elle une cheville de bois, longue d’une vingtaine de centimètres, et qui, terminée à l’une de ses extrémités par le rectangle de bronze, porte à l’autre une sorte de petite rosace dorée.

Il n’y a pas de doute, cette cheville aveugle une ouverture forée dans le mur. La rosace doit se raccorder avec l’ornementation intérieure de la pièce.