Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/219

Cette page a été validée par deux contributeurs.
211
MISS VEUVE.

— Dans la voiture naturellement.

— Priez-le de descendre me parler.

Du coup, Klausse comprit qu’il ne pouvait se dispenser d’obéir. Il se retourna vers le carreau mobile ; mais avant même qu’il l’eût heurté, celui-ci s’abaissa, et la tête pâle du doktor s’encadra dans l’ouverture.

— Vous désirez que je descende, capitaine ? prononça le nouveau venu de sa voix grave et nette.

— J’en serais très aise.

— Vous insisteriez même si je vous déclarais être fort pressé ?

Le hauptmann eut un rire impertinent.

— J’insisterais.

— Parce que vous reconnaissez en moi un citoyen paisible, incapable de mettre la machine en mouvement et de vous passer sur le corps.

— Oh ! oh ! vous menacez, je crois, grommela l’interpellé.

Herr Listcheü protesta vivement.

— Non, non. Je suis sûr que vous ne vous obstinerez pas dans votre blessante proposition.

— C’est trop fort !

— Et que, continua le doktor sans tenir compte de l’interruption, vous allez courtoisement descendre sur le bas-côté de la route, afin de me livrer passage.

Cette fois, le hauptmann se sentit à bout de patience.

— Dix hommes en armes, cria-t-il de toute la force de ses poumons.

Et un groupe de soldats se précipitant derrière lui de façon à occuper toute la largeur de l’avenue.

— Voilà, dit-il, comme j’ouvre le passage. Maintenant, descendez ou je ne réponds plus de ce qui arrivera.

— Vous vous calomniez, hauptmann, riposta imperturbablement Herr Listcheü. Vous allez dégager le chemin.

Avec un geste de rage, l’officier se tourna vers ses soldats :

— Apprêtez vos armes !

Le commandement menace ; la poudre va parler. Et cependant sur la figure blême du docteur, un sourire passe. C’est d’une voix presque caressante que le singulier personnage prononce :

— Allons, capitaine, un bon mouvement. Dégagez le milieu de la route.

Le hauptmann ouvre la bouche. Il va bien certainement ordonner le feu. Non. Aucun son ne jaillit de ses lèvres.