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L’AÉROPLANE-FANTÔME

donnerait pas de refuser un renseignement à des officiers de notre glorieuse armée.

— Alors, cela ira tout seul. D’où venez-vous ?

— De Dresde en droite ligne. Herr Doktor et sa famille sont dans la voiture.

— Une belle voiture, ça doit coûter quelques pfennigs.

— Certes. Herr Doktor croit que la plupart des insuccès médicaux proviennent de la mauvaise qualité des remèdes fournis par des pharmaciens peu consciencieux. Alors, il a fait construire cette automobile, et il emporte sa pharmacie avec lui.

— Ah ! c’est un magasin roulant ? Très ingénieux. Mais je reprends. Vous venez de Dresde, et votre destination est… ?

— Grossbeeren, le champ d’aviation. Herr Doktor et ses enfants veulent voir un aéroplane étonnant. Vous savez bien, le grand chose militaire dont tous les journaux ont parlé.

— En ce cas, vous pouvez faire demi-tour.

— Il est interdit de passer ?

— Du tout. Seulement, si vous allez à l’aérodrome pour voir l’aéroplane, il est inutile de vous fatiguer. Plus personne ne le verra. Pour être clair et bref, je vous apprendrai que l’aéroplane n’existe plus.

— Un accident, balbutia le mécanicien d’un ton lugubre.

— Non, un crime.

— Teufel !

D’un mouvement brusque, le watman se retourna, heurta un carreau découpant son rectangle dans la paroi du wagon-automobile.

Celui-ci s’abattit aussitôt, et tandis que le mécanicien murmurait d’une voix respectueuse :

— Herr Doktor !… C’est moi qui… une chose tout à fait inattendue…

Les officiers considéraient avec intérêt la singulière figure qui venait de s’encadrer dans l’ouverture.

Cette figure était belle, mais sa pâleur étonnait sous les longs cheveux noirs. Devant cette opposition, on demeurait pénétré d’un vague malaise, d’une angoisse pénible. Il semblait que s’évoquât en face du curieux un mystère décevant de douleur.

— Que veux-tu, mon brave Klausse ?

La question du docteur Listcheü sonne aux oreilles des hussards rouges ainsi qu’une plainte.

Sans doute, Klausse est accoutumé à ce timbre étrange. Et puis un méca-