Page:Ivoi - L’Aéroplane fantôme.djvu/188

Cette page a été validée par deux contributeurs.
180
L’AÉROPLANE-FANTÔME

Elle courut à lui.

— Je viens de déposer le manteau, le voile, qui ont intrigué Votre Majesté.

— Le manteau, le voile ! Comment, c’était vous ?

Et sa colère se ranimant, l’impérial interlocuteur acheva :

— Vous qui m’avez apporté cette missive de Miss Veuve.

La jeune personne s’agenouilla avant de répondre :

— Moi qui l’ai apportée, ignorant son contenu et son signataire, moi qui viens m’exposer à votre mécontentement, car le courroux que je lis dans vos yeux m’apprend que les racontars de la Cour sont exacts.

— Les racontars ?

— On dit que vous avez reçu une communication de Miss Veuve.

Elle courbait sa jolie tête avec une mutinerie suppliante, si gentille ainsi, que l’organe de l’Empereur se fit caressant pour continuer :

— Alors, Louise-Marie, quand vous avez su cela… ?

— Je suis accourue pour me confesser à vous, Sire, et aussi peut-être pour vous permettre de châtier celui qui a causé tout le mal.

Puis vite, arrêtant les interrogations prêtes à dépasser les lèvres des auditeurs :

— Laissez-moi raconter. Encouragée, outre mesure sans doute, par la bonté paternelle que vous me témoignez, j’avais résolu de vous intriguer. Grâce au concours d’une de mes dames d’honneur, je m’étais procuré un manteau-domino, un voile épais, et, m’étant esquivée de la Salle des Chevaliers, sans attirer l’attention, j’avais rejoint ma… complice qui m’attendait dans sa chambre au 4e étage. Je m’encapuchonnai comme vous m’avez vue, et laissant mon habilleuse improvisée dans son logis, je redescendis vers les salons de réception. J’allais me glisser dans la Salle des Suisses, pour me mêler à la file des arrivants venant vous saluer, quand un jeune homme, je dis jeune à cause de son apparence, car il portait le masque comme tout le monde, s’approcha de moi.

— On prétend que S. A. Louise-Marie est bonne autant que belle, dit-il.

Et comme je sursautais, très vexée d’être reconnue, alors que je me flattais d’être méconnaissable, il reprit :

— Oh ! celui qui veut supplier est plus perspicace qu’un autre, et c’est un suppliant que vous avez devant vous, Altesse.

— Un suppliant ?

— Oui. Cette enveloppe remise à S. M. l’Empereur sauverait plusieurs existences humaines. J’ai pensé que vous ne refuseriez pas de la lui donner, ce que moi, humble gentilhomme, je ne saurais faire.