duisit, le chariot roulait à vide, Kan-So et ses lieutenants ayant eu le temps de le décharger et de cacher les lingots dans les carrières de plâtre abandonnées au nord du bois de Lincolt. Strig en personne, devenu charretier, conduisait le tombereau vers la Susquehannah, où il l’a précipité avec le cheval.
Jud Allan hocha la tête, comme pour approuver les mesures prises par les bandits.
— Bien raisonné, fit-il à mi-voix. On va poursuivre les lingots dans toutes les directions. Il ne se présentera à l’esprit de personne qu’ils sont là, à deux pas du théâtre du crime.
— Oh ! riposta la fillette. En eût-on la pensée, qu’on ne les tiendrait pas encore, attendu que l’accès des carrières est très difficile. Des éboulements encombrent plusieurs galeries. Puis il existe un assez grand nombre d’issues, et sans les indications de deux boys, qui naguère ont un peu travaillé dans le plâtre, je n’affirmerais pas que les coupables y sont toujours terrés. Storm, du reste, se promène aux environs. Je l’ai laissé libre de veiller selon son instinct de chien de berger.
Elle reprit :
— Autre chose. Un télégramme de Washington, à l’adresse de William Starnegie.
— Qu’est William Starnegie ?
— Le nom sous lequel Kan-So s’était fait inscrire à l’hôtel de Jersey-Shore. Le porteur a compris le subterfuge. Il a trouvé le moyen de différer la remise assez longtemps pour prendre cette copie.
En proie à une angoisse extraordinaire, Jud lui arracha presque le papier des mains. Et il lut :
« Achats terminés, rendez-vous no 5. Extrêmement important. Affaires embrouillées nécessitent réunion conseil administration. »
Il leva les yeux, interrogeant la fillette du regard. Elle lui tendit un second papier, celui-ci reconnaissable pour un télégramme officiel, ainsi conçu :
« À miss Suzan. Cleaver house. Jersey-Shore.
« Pensylvania désert. Départ précipité, nuit réunion lads. Impossible retrouver traces… »
Il ne continua pas.
— Tu as raison, Suzan. Jemkins a dépisté nos amis. J’ai perdu sa trace, comme il a perdu la