Page:Itinéraire de Cl Rutilius Numatianus, poème sur son retour à Rome, trad Despois, 1843.djvu/13

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chanterai toujours, tant que le permettra le sort ; la mort seule peut effacer ton souvenir. Oui, je pourrais plutôt méconnaître la lumière du jour, qu’étouffer dans mon cœur le culte que je te dois ! Tes bienfaits s’étendent aussi loin que les rayons du soleil, jusqu’aux bornes de la terre qu’enferme la ceinture de l’Océan. C’est pour toi que roule Phébus, dont la course embrasse l’univers ; ses coursiers se couchent et se lèvent dans tes États. Les sables brillants de la Libye n’ont pu t’arrêter ; l’Ourse t’a vainement opposé ses remparts de glaces. Aussi loin que le voisinage des pôles permet à l’homme de vivre, aussi loin ta valeur a su se frayer un passage. Aux nations diverses tu as fait une seule patrie ; les peuples qui ignoraient la justice ont gagné à être soumis par tes armes ; et, en appelant les vaincus au partage de tes droits, de l’univers tu as fait une seule cité. Nous reconnaissons pour auteurs de ta race Vénus et Mars, la mère d’Énée et le père de Romulus : ta clémence victorieuse sait tempérer la vigueur de tes armes ; tes mœurs rappellent ainsi l’influence diverse de ces deux divinités. C’est pour cela que tu te plais également à combattre et à pardonner ; à dompter ceux que tu as pu craindre, à chérir ceux que tu as domptés. On adore la déesse qui apporta l’olivier aux hommes, le dieu qui leur donna le vin, et l’enfant qui, le premier, enfonça dans la terre le soc de la charrue ; la médecine par l’art de Péon a mérité des autels ; la gloire d’Alcide en a fait un dieu. Et toi, dont les triomphes embrassent et civilisent le monde entier, tu fais de l’univers une vaste société ; c’est toi, déesse, toi que célèbrent tous les peuples devenus Romains ; tous portent une tête indépendante sous ton joug pacifique. Les astres, dans leur invariable et éternelle carrière, ne virent jamais empire plus magnifique. Quel empire, en effet, comparer au tien ? Vainqueurs de leurs voisins, les Mèdes n’ont uni leur territoire qu’à celui