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prit et lança par la fenêtre, pendant que Kyra cachait rapidement les deux narguilés qui étaient de trop.

Cette scène fut si amusante que moi, la colère passée, je fus saisi d’un accès de fou rire, tombai de l’embrasure, roulai sur le tapis, et devins violet par manque de respiration. Ma mère crut que j’étais vraiment fou de peur à cause de l’arrivée du père ; les pauvres femmes percèrent l’air de leurs cris épouvantés, oublièrent le père, le diable et se jetèrent sur moi, désespérées.

« Il n’y a pas de père !… » pus-je enfin répondre ; « mais j’étais fâché parce que Kyra s’est laissé tâter la jambe !… Et je me suis vengé !… Voilà !… »

La joie les fit maintenant crier bien plus haut. Elles me tapotèrent durement les fesses, m’embrassèrent, et on se mit à sauter dans la chambre, contents d’en être quittes, elles avec la frousse, moi avec une petite correction doublée de caresses.

De cette façon, deux ou trois années s’écoulèrent encore, les seules de mon enfance dont le souvenir me reste précis.