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ils avaient une mise élégante, les moustaches pointues, la barbe très soignée ; et les cheveux, lisses ou frisés, exhalaient une forte odeur d’huile d’amande parfumée au musc. C’étaient des Turcs, des Grecs, et aussi, rarement, des Roumains, car la nationalité ne jouait aucun rôle, à condition que les amoureux fussent jeunes et beaux, délicats, discrets et pas trop pressés.

Ma situation était très ingrate… À personne je n’ai parlé jusqu’à ce moment-ci de ce que fut mon supplice d’alors.

Mon devoir était de veiller, assis sur le rebord de la fenêtre, et d’éviter toute surprise. Cela me plaisait bien, car je haïssais à mort les hommes de Karakioï qui nous battaient. Mais dans ma poitrine se livrait une lutte terrible entre mon devoir et ma jalousie.

J’étais jaloux, férocement jaloux.

La maison était située au fond d’une vaste cour entourée de murailles. Il y avait des fenêtres qui donnaient sur cette cour, et d’autres fenêtres, derrière, qui étaient suspendues au bord du plateau dominant le port. On ne pouvait pénétrer dans la maison que par la seule entrée de face ; mais pour se sauver, ma foi, on