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« Stavro !… Pourquoi as-tu fait cela ? »

L’interpellé se tourna vers le jeune homme et répondit, d’une voix oppressée :

« Mais, mon pauvre ami : c’est parce que je suis très malhonnête ! Je te l’avais dit. »

Calmé, Mikhaïl lui répliqua :

« C’est pire que de la malhonnêteté : c’est de la perversion. C’est une violence commise sur un équilibre où tout est harmonie : vous avez vicié cet équilibre. Et vous commettez le pire des crimes quand vous voulez propager, étendre ce vice. »

Et Mikhaïl ajouta avec fermeté :

« Faites des excuses sincères à Adrien, sinon, je vous plaque ici, vous et la baraque ! »

Stavro ne répondit rien. Il se faisait une cigarette ; et lorsqu’il l’alluma, les deux amis virent, de profil, que son visage était méconnaissable. La bouche et le nez étaient allongés, la moustache braquée en haut. Le teint avait une couleur de spectre. Les yeux enfoncés, il ne les regarda pas ; pas même quand, à leur tour, s’étant fait des cigarettes, ils les allumèrent.

Dehors, les aboiements des chiens et le chant des coqs remplissaient l’air et la nuit.