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rement caché par un fin voile de tissu blanc, — circulaient en tous sens. Des voix sonores, des éclats de rires rappelant le tintement des verres de cristal touchés par une baguette, des conversations joyeuses montaient de partout. Je fus ébloui du charme des voix comme du pittoresque des costumes ; je me souvins que c’était vendredi, le dimanche musulman. Les salutations entre les femmes étaient rares, gracieuses et discrètes ; mais entre les hommes, les effusions sentimentales, les salamalecs et les poignées de mains à répétition occasionnaient de longs arrêts aux piétons. On parlait beaucoup le turc ; néanmoins, l’arabe dominait.

Je restai longtemps à admirer ce va-et-vient. Puis, les voitures et les piétons se raréfièrent. Songeur, troublé, le cœur harcelé entre le désir de vivre, la soif de joie, mon malheur, ma ruine, je continuai ma route. Bientôt je me trouvai seul, seul et triste. Une belle voiture à deux chevaux venait au trot, en sens contraire. Lorsqu’elle fut prête à me croiser, ma respiration s’arrêta, mon cœur cessa de battre…

Kyra était dans la voiture…

Oui, je crois encore en ce moment que c’était ma sœur douce et aimée ! C’était