Page:Istrati - Kyra Kyralina.djvu/186

Cette page a été validée par deux contributeurs.

neaux et même des corbeaux, vinrent furtivement picoter sous mes yeux.

Un jour, à mon étonnement, un gros chien apparut parmi les arbres. Il se tint à une distance respectueuse des fenêtres, flaira l’air, et, à mon appel, mit la queue entre ses jambes et fila tristement. Je pensai :

« Celui-là doit avoir goûté, lui aussi, de la tendresse des hommes ! »

Les jours suivants il revint et s’approcha un peu plus. Pour ne pas l’effrayer, je me tins caché, et jetai dehors les trois quarts de mes copieux repas. Enfin, petit à petit, il se familiarisa avec moi. À mes paroles d’amitié, il daigna répondre en agitant le bout de sa queue, et s’en alla, me laissant comprendre que je devais me contenter de ça, ce jour-là. Je lui donnai raison, car fort de ma propre expérience, j’étais moi-même décidé à être un peu plus circonspect dans le choix de mes affections si le ciel voulait m’aider à recouvrer un jour ma liberté.

Ce chien était d’âme fort distinguée. Quoique affamé, il mangeait avec délicatesse, semblait vexé de ramasser sa nourriture par terre, mâchait longuement et ne rongeait jamais les os. Sûrement, il devait avoir une grosse rancune sur le cœur.