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restait immobile, le menton appuyé dans la paume, et regardait nonchalamment vers la sortie, un verre de tzouika devant son nez. Il avait dans son extérieur tout ce qu’il fallait pour détourner de lui les regards des gens ; et cependant, — quoique loin de croire à l’existence d’un Stavro en Égypte, — Adrien sentit son cœur battre pour ce vieux solitaire, silencieux et impassible. Il aurait voulu le voir de face ; mais l’homme ne bougeait pas, paraissant engourdi. Alors, — utilisant l’habitude orientale qui permet à un inconnu de faire servir une consommation à un autre inconnu de sa condition, ou en dessous, simplement par sympathie, — Adrien appela le garçon et le pria de servir, de sa part, une tzouika à l’homme assis dans le coin ; cela devait entraîner un échange de remerciements et de souhaits. Au lieu de cela, et à sa grande surprise, il vit l’inconnu refuser la consommation qu’il n’avait pas demandée.

« C’est de la part de ce monsieur-là », dit le garçon en indiquant Adrien.

« Ça m’est égal », répondit l’homme, sans regarder du côté qu’on lui montrait.

Mais le timbre de sa voix suffit à Adrien pour reconnaître Stavro, et il alla, tout ému, lui toucher l’épaule. La parole étouffée, il