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pendant que l’aîné nous poussait à l’entrée. Il nous fit asseoir sur un divan, et là, dans l’obscurité complète, il nous dit :

« Je vous embrasse, Kyralina, Dragomir, pour la dernière fois peut-être… Votre père est le troisième homme que je rate, et, si je dois en croire mon ursita, ma mort doit venir de la main du troisième ennemi que mon arquebuse a raté par pleine lune. Bien sûr, je tâcherai de défendre ma peau, mais on ne détourne pas son destin. Écoutez maintenant !… Le patron de l’hôtellerie où votre mère est abonnée viendra dans un moment vous prendre. Chez lui, vous trouverez deux chambres et le nécessaire ; demain, il reviendra ici pour enlever vos effets personnels. Dans cette maison, vous ne mettrez plus les pieds, jamais !…

— Vous ne nous emmenez pas ? » demanda Kyra, d’une voix tremblante.

« Non, je n’ai pas ce droit… Notre vie est dure et vous êtes élevés dans le duvet…

— Mais alors, notre père nous tuera…

— Il ne vous tuera pas… D’ailleurs, d’ici à peu de temps, nous le mettrons de nouveau en joue, et alors, il n’échappera plus : d’une façon ou de l’autre, il périra, car nous sommes deux, et il est seul. Vivez donc selon votre goût et faites comme si vous ne nous aviez jamais connus : vous ne