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trant, insupportable, mais clair et franc. Leurs mains poilues semblaient des pattes d’ours ; ils étaient noirs comme des diables dans leurs ghébas[1], qui les enveloppaient depuis le cou jusqu’au-dessous des genoux.

Ils restèrent un instant ainsi plantés, à nous regarder ; moi, debout, croyant me trouver devant deux apparitions de contes ; Kyra, jetée à leurs pieds. Puis, ils enlevèrent leurs manteaux, et je vis qu’ils étaient habillés à la mode turque : vestons sans manches, pantalons larges, vaste ceinture de laine rouge ; mais surtout je fus terrifié de voir qu’ils étaient armés jusqu’aux dents, comme de vrais antartes[2] : arquebuse à canon court, accrochée aux épaules ; pistolets et coutelas enfouis à la ceinture.

C’est à ce moment que la terrible passion de Kyra éclate comme un coup de foudre. Par une seule prière à ces deux hommes puissants, elle anéantit une famille, tombant elle-même victime de sa passion vengeresse.

Le plus âgé des deux hommes souleva Kyra et la regarda dans les yeux, les mains sur ses épaules. Une grimace esquissée dans la forêt de poils qui lui couvrait le

  1. Manteaux de paysans.
  2. Brigands grecs.