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nous montra de l’index la voûte céleste, nous tourna le dos et disparut.

« Qu’est-ce que cela voulait dire ? » demandai-je à Kyra.

« Cela voulait dire, mon cher frère, que nous nous reverrons dans le ciel », me répondit-elle.

Je n’ai plus revu ma mère…

Restés seuls, nous oubliâmes que nous étions affamés et nous pleurâmes enlacés jusqu’à ce que l’épuisement et la chaleur du soleil nous plongeassent dans un sommeil bienfaisant. Au réveil, nous eûmes l’impression que nous n’appartenions plus à ce monde, qu’une chose épouvantable venait de se passer ; et nous ne savions plus si nous étions la proie d’un cauchemar, ou si notre vie jusqu’à ce moment avait été un rêve. Devant nous, un champ de colza nous envoyait son parfum sous le souffle léger d’un zéphyr étouffant ; et des papillons, des libellules, des guêpes nous agaçaient sans cesse avec leur joie non partagée.

L’heure de vêpres arriva… Le soleil, descendant vers l’horizon, perdait de son éclat… Nous nous inquiétâmes, et nos regards commencèrent à scruter le chemin solitaire du côté où la mère avait disparu ;