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Ma mère alla à une fenêtre, ouvrit et aspira profondément l’air frais… À côté d’elle, moi et Kyra, nous regardions l’aurore éclairant déjà les marécages et la forêt de saules. Puis se tournant vers ses convives :

« Eh bien, mes amis, la fête est finie !… On va se coucher », dit ma mère.

À ce moment, le bruit d’un corps tombant lourdement dans la cour nous fit tressaillir, et, peu après, on entendit le grincement du verrou et des gonds du portail. Ma mère cria :

« Sauvez-vous !… ils ont escaladé le mur !… »

Et pendant que le père et son fis frappaient à la porte, les invités se jetaient par les deux fenêtres, oubliant toutes précautions, comme si dehors les attendaient des matelas de laine. Les musiciens furent les premiers à déguerpir, et les suivants les bousculaient par les fesses, en dépit du conseil de ne pas sauter trop loin. En quelques secondes, la maison était vide, les moussafirs, les uns sur les autres, roulaient sur la côte sablonneuse ; mais quant à cacher les traces de la fête, il ne fallait même pas y penser.

Et alors, bravement, maman alla ouvrir. Elle fut immédiatement empoignée par les cheveux et jetée à terre ; le frère fit de