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et qu’elle voulait la vivre intensément.

Des sept invités, trois étaient des musiciens grecs renommés dans les fêtes du temps. En ouvrant le bal, maman offrit à chacun d’eux une petite bourse en cuir contenant dix ducats de douze francs enveloppés dans un mouchoir en soie brodée, et leur dit :

« Palicarias ![1] Vous avez dans ces bourses cinq fois plus que votre droit, en jouant toute la nuit !… Je ne vous l’offre pas seulement par générosité. Dans cette maison, la joie se paie cher, et il se peut que vous soyez obligés ce soir de sortir par ces fenêtres : avez-vous les jambes souples ?… »

Et elle ouvrit les fenêtres suspendues sur le ravin. Les palicarias se penchèrent, inspectèrent, pesèrent le poids de l’or en faisant danser les bourses dans leurs mains, et acceptèrent avec un courtois : Êvallah !… Le jeu, le chant, la danse commencèrent.

Les trois instruments : clarinette, fifre et guitare, étaient adroitement maniés. Kyra et maman, indolentes l’une à côté de l’autre sur le sofa, écoutaient, ravies, le récit plaintif, puis tumultueux des Doïnas roumaines, les languissantes maniehs turques, et les pastorales grecques, accompagnées des cla-

  1. En grec : vaillants !