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— Quel brave homme, mon Casimir !… Y’ a pas plus brave homme que lui dans tout Ménilmontant !

Aussi put-elle, le lendemain, procurer à ce si brave homme un petit pécule de sept francs cinquante, laborieusement arrachés, comme avance d’honoraires, à l’avarice d’une cliente.

Ainsi lesté, Casimir alla tomber, bien entendu, à l’heure de l’apéritif, dans le petit bar où devait inévitablement se trouver, à cette heure sacrée entre toutes, l’homme de peine de la bijouterie Clarinet.

Après un quart d’heure de conversation agréable et suggestive, puisque consacrée, avec preuves à l’appui, aux valeurs comparées de diverses boissons alcooliques, Casimir insinuait adroitement :

— Et ton singe, vieux frère, y va toujours d’une façon avantageuse et boulottante ?

— J’en sais rien de rien, répondit l’autre, vu que le singe, depuis hier matin, est en voyage à l’étranger, hors Paris. Il était pas mauvais, ce picon-citron, mais, si je m’aurais consulté plus attentivement, je crois que j’aurais préféré un anis à la gentiane.

— Patron, deux anis à la gentiane !… Alors, si ton singe est migrativement défectif, je m’accrédite que c’est son fils Gaston, ce beau grand jeune homme, qui le relaie dans le commerce comme coadjuteur de rechange ?

— Tu fais-t-erreur, ma vieille, vu que M. Gaston il est aussi dans les pays lointains, où que le singe l’a emmené de force.

— De force, nom d’une cuite !… C’est-y que le jeune homme aurait barbotivement usurpé quelques brillants et autres camées paternels, peut-être bien ?

— T’es pas, que j’ te dis !… C’est toute une histoire, ma vieille. Avant-hier au soir, M. Gaston a rentré qu’il était comme un âne en peigne, ainsi qu’on dit… Sa maman elle lui a tiré les vers du nez, vu qu’y a pas plus chien que cette vieille poule-là pour moucharder tout le monde en général, et l’homme de peine en particulier… Le jeune homme a fini par avouer qu’il avait du chagrin rapport à ses amours, étant donné que c’est encore trop innocent pour comprendre que toutes les poules du monde, ça vaut pas un apéro bien