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par un beau dimanche

— Dame, je ne suis pas pressée de le mettre au courant. Il a fait rater trois mariages à cette pauvre Joséphine, qui en sèche sur pied, et je me doute bien qu’il ne sautera pas au cou de François si je le lui présente comme ça, tout de go.

— Alors, que comptes-tu faire ?

— Je ne sais pas, mon oncle… Nous attendons… Vous n’auriez pas une bonne idée à nous suggérer, par hasard ?

Le docteur réfléchit un instant, puis, en homme toujours pratique, reprit les choses d’un peu loin.

— Chez les peuplades primitives de l’Afrique, dit-il, le fiancé achète sa femme aux parents de celle-ci en leur offrant un tribut en nature : des défenses d’éléphant, une couple de vaches…

— Assez, mon oncle ! interrompit Marie… Nous ne sommes pas en Afrique et vous venez de voir que papa n’aime pas les vaches… Si vous ne trouvez rien de mieux pour m’aider…

— T’aider !… T’aider !… Tu pourrais d’abord me demander si je veux bien !… Tu oublies que mon devoir est de te gronder, de te défendre de revoir ce jeune homme !… Tu oublies que je dois tenir compte de l’autorité paternelle, qui s’est beaucoup affaiblie de nos jours, mais qui, jadis, au temps des Romains…

Mais il s’interrompit, constatant que Marie se souciait fort peu des Romains, tout occupée à envoyer derrière elle de petits signes de tête affectueux, accompagnés de son sourire le plus charmant.

M. Brusy tourna la tête et vit un superbe chapeau gris qui pointait entre deux buissons. Sans la moindre énergie, le sévère Mentor esquissa de la main, à hauteur de sa hanche, le geste assez peu autoritaire par lequel on congédie d’habitude les gamins qui vous suivent en mendiant