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par un beau dimanche

en convenez enfin ? Ce n’est pas malheureux… Alors, quand vendons-nous ?

— Il ne s’agit pas de cela, se hâta de dire M.  Brusy. Tout en causant, je vous ai fait prendre ce sentier de traverse, croyant que Joséphine et Marie nous suivaient. Je ne les vois plus ; elles nous cherchent sans doute sur le grand chemin. Courons à leur rencontre.

— Vous n’en faites jamais d’autres ! bougonna le beau-frère. Il est loin d’ici, votre grand chemin ?

— Cinq minutes à peine.

— Rien que ça !… Et vous croyez que je vais descendre et remonter cet affreux sentier pour réparer vos bêtises ? Arrangez-vous, mon cher : vous avez égaré mes filles, retrouvez-les.

— Entendu ! J’y cours et vous les ramène sans tarder, répondit le docteur avec un remarquable empressement.

Et, sans perdre une seconde, il dévala le sentier au petit trot, l’air de plus en plus enchanté d’avoir égaré ses deux nièces.

Resté seul, M.  Hougnot, pour ne pas en perdre l’habitude, stigmatisa, par quelques injures bien senties, l’imbécillité des hommes en général, et celle de son beau-frère en particulier. Ce devoir accompli, il étala son mouchoir sur un quartier de roche, s’assit, alluma un cigare et se mit à faire des ronds de fumée, genre de travail où il était passé maître, et le seul, à vrai dire, pour lequel il eût jamais montré quelque aptitude et une réelle inclination.

Il suivait de l’œil, avec la satisfaction d’un artiste ravi de son œuvre, une couronne particulièrement bien venue, quand un long beuglement le fit tressaillir et se lever soudain… Une grosse vache rousse parut au haut du sentier, dont ses flancs rebondis obstruèrent toute la largeur, et descendit à pas lents vers M.  Hou-