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par un beau dimanche

— C’est à cause de la loi d’équilibre, déclara le docteur… Cette pierre et le huitième satellite de Saturne sont, au même titre…

Mais, sentant que l’explication serait peut-être un peu longue, il rougit, s’arrêta net, et, sans se lever de sa brouette, adressa quelques gestes fort vaguement explicatifs à la muraille qui se dressait devant lui.

— Venez donc vite, mon oncle ! implora la grande jeune fille. Papa a perdu nos tickets, et il y a là une vieille femme qui ne veut pas nous laisser sortir.

M.  Brusy avait sans doute eu le temps de redescendre tout à fait ici-bas, car il sortit de sa brouette, et, sans dire un seul mot, s’élança en trottinant vers le wagon-salle d’attente, auprès duquel il voyait s’agiter avec frénésie, devant la masse impassible de Monsieur le Chef de Gare, la silhouette bien connue de son beau-frère, Walthère Hougnot.

Posez, sur le corps d’un garçonnet rachitique et scrofuleux, un masque étroit et blême, hirsute et cruel de guerrier japonais. Étirez ses moustaches de matou en colère, et d’un noir évidemment artificiel, jusqu’à ce qu’elles dépassent de quelques centimètres la carrure des épaules, d’où il ne s’ensuit pas que les moustaches doivent être très longues. Coiffez d’un haut-de-forme le crâne luisant et bossué. Pendez aux épaules étroites le costume trop voyant, trop soigné, d’un jeune calicot en quête de bonnes fortunes. Emballez dans des guêtres blanches et des souliers vernis deux larges pieds de goutteux. Et vous aurez le fidèle portrait de Walthère Hougnot, en prise de bec, pour l’instant, avec Monsieur le Chef de Gare :

— Je suis un honnête homme, madame ! J’ai pris mes tickets, je les ai payés ! Vous devez donc me laisser sortir !