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se retournant d’un air inquiet vers l’auberge silencieuse, presque noyée dans l’ombre.

Derrière le hêtre pourpre, un hiatus béait dans la clôture. La semaine précédente, Eudore s’était imaginé, de chic, sans la moindre raison, que le magot de Séraphie dormait enfoui sous cette haie. Il en avait déplanté deux ou trois mètres, courageusement, puis s’était trouvé trop ivre pour continuer ce jour-là, et n’y songeait plus dès le lendemain. Un faisceau de branches mortes bouchait provisoirement la brèche et François n’eut même pas à sauter pour les franchir. Dans sa marche tâtonnante, il fit un faux pas, crut s’appuyer à la haie, culbuta le tas de ramures, tomba dessus et se trouva dans le jardin, vautré aux pieds de sa bien-aimée, avant de comprendre ce qui lui arrivait.

— Vous ne vous êtes pas blessé ? demanda Marie inquiète.

— Bas du tout !… Atchoum ! répondit l’amoureux déjà relevé.

Et, empoignant la jeune fille par les épaules, il voulut l’embrasser, avide et joyeux. Mais, au moment où ses lèvres allaient toucher la joue si douce, si fraîche, si désirée, il dut se détourner, tout à coup, secoué par une quinte formidable d’éternuements.

Un peu déçue, peut-être, Marie s’indigna.

— En vérité, dit-elle, on jurerait que vous le faites exprès. Si papa vous entend, nous sommes frais.

— Boi, surtout ! affirma le pauvre garçon, en tâtant ses hardes tout humides encore… Si je be suis enrhubé, Barie, c’est bour l’abour de vous, bour vous suivre bartout, balgré tout… Atchoum !

— C’est bon ! murmura-t-elle, boudeuse et inquiète… Entrons là-dessous, ça étouffera peut-être un peu le bruit.