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par un beau dimanche

Mais Marie se leva du coffre en disant de sa voix la plus douce, la plus aimable :

— Prends donc ma place, papa. Ma robe est déjà presque séchée.

Le tendre père hésita, consulta du regard son beau-frère, dont le haussement d’épaules évasif et goguenard ne le rassura guère, puis se dirigea vers le foyer à pas très incertains, sans quitter Pas-Bon des yeux, et prêt à bondir en arrière au moindre mouvement de l’idiot. Celui-ci ne fit rien pour entraver la manœuvre. Mais, quand Marie eut cédé la place à son père, il pointa son index vers la jeune fille en proférant de sa sourde voix de gorge : « Bon… Bon… » Puis, tournant son doigt vers Hougnot, qui s’affala soudain sur le coffre, il gronda énergiquement : « Pas bon… Pas bon… » Sur quoi, il disparut dans le fond de la grotte, puis revint en tramant une énorme souche qui ne devait pas peser loin de deux cents livres, la roula près au feu, empoigna Marie et le docteur par le bras, comme un sergot qui conduit deux pochards au violon, et les installa sur ce siège improvisé, d’un air qui n’admettait pas de réplique.

Puis il s’accroupit près du foyer et se mit à farfouiller dans les cendres, en extrayant des pommes de terre brûlantes avec les gestes vifs et sûrs d’une guenon qui épluche des noix. Cependant, Hougnot essayait de percer, d’un regard férocement sévère, l’épaisse colonne de vapeur qui s’élevait autour du jeune et sympathique repêché. Et ce regard était bien fort, sans doute, car on vit l’impénétrable rideau de vapeur s’agiter, une main fumante en sortir pour esquisser deux ou trois gestes piteux, embrouillés, dépourvus de toute signification. Puis, au sein du nuage, une voix faible chevrota :

— Monsieur, je vous remercie infiniment de