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— C’est moi, monsieur, qu’on nomme N’importequi ! Vous m’avez insulté, nous nous battrons !

Noblement, Cul-de-Plomb riposta :

— Je vous em…

Voir la suite dans les Misérables, chapitre « Waterloo ».

On commençait à être las de chanter, et cette aventure faisait une heureuse diversion. Aussi, les témoins ne nous manquèrent pas. Cul-de-Plomb en eut sept aussitôt, et moi onze. Ils décidèrent à l’unanimité plus une voix, celle du cabaretier, qui vota spontanément, que la rencontre aurait lieu à l’instant, dans la rue, avec les fleurets du second prix, démouchetés à cet effet.

Nous sortîmes. Aussitôt que le dernier d’entre nous eut franchi le seuil, la porte du café se referma, et la lumière s’éteignit à l’intérieur. Il faisait très froid, la neige commençait à tomber, mais on la sentait sans presque la voir, tant la nuit était obscure, une municipalité économe faisant éteindre dès minuit tous les réverbères.

Nos témoins nous obligèrent à quitter pardessus, vestons et gilets. L’un d’eux proposa même de nous enlever nos bottines ; mais quand on lui demanda sur quelles règles sportives il basait cette proposition, il se lança dans un discours très confus, où il était question des athlètes grecs et des mosquées de Constantinople. Il finit par bredouiller, s’interrompit soudain, et se retira en sanglotant, d’un air piteux et désespéré. On nous permit donc de conserver nos chaussures. Cul-de-Plomb refusait avec énergie de lâcher sa boîte de cigares, qu’il serrait toujours sur son cœur ; mais on lui fit observer que le combat avait lieu à armes égales, et que si je n’avais pas de boîte de cigares,