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— C’est ce que je disais. Roland ne tape jamais à la première rencontre. Mais, je t’en avertis, à la seconde il tape toujours, et n’a jamais raté son coup. Donc, la prochaine fois, tu seras tapé.

— Je ne vous crois pas, dis-je, pour deux raisons. D’abord, M. de Vallombreuse ne peut être l’homme que vous prétendez. Ensuite j’ai fait le serment solennel de ne jamais prêter d’argent à personne. Jamais homme au monde ne m’a tapé d’un sou, ne me tapera d’un centime…

— Il n’y a pas de serment qui tienne, répond Panuche. Roland est le premier tapeur de Paris. Il n’a jamais raté son coup. À votre prochaine rencontre, tu seras tapé.

Il m’agace, il me dégoûte même un peu, ce fielleux personnage. Je lui serre la main assez froidement, et je m’en vais. Il me crie encore de loin, bien haut, pour que tout le monde entende ses sales calomnies :

— Tu seras tapé ! Tu seras tapé ! Le beau Roland te tapera !

Mardi. — Roland de Vallombreuse vient me voir, comme il me l’avait promis hier. Il m’annonce qu’il a vu Claretie, et me présentera à lui la semaine prochaine. Je suis fou de joie ! Nous causons de choses et d’autres. Roland cherche dans son portefeuille, pour me la montrer, une lettre de son ami, le maharajah de Singapour. Soudain il éclate de rire et s’écrie :

— Elle est bien bonne ! On m’attend aux courses, et j’ai oublié de me munir d’argent. Très cher, prêtez-moi donc cinquante louis jusqu’à demain.

Panuche aurait-il dit vrai ?… Non, c’est impossible… C’est un pur hasard, une simple coïncidence… Bien entendu, je réponds :

— Vous me voyez au désespoir, mais j’ai juré de