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que chose comme la botte de Nevers des boxeurs. Il se plaçait devant son homme, et pan ! il lui envoyait son coup en plein sur le nez ! L’autre s’étalait les quatre fers en l’air, et n’y revenait jamais plus. Ce n’est pas plus difficile que ça… Pan ! et c’est fini !

Line riait d’aise. Elle répétait, après le beau boxeur aux longues moustaches : « Pan ! c’est fini ! » Et elle sentait une grande joie monter et grandir en elle, comme si tous ces hommes qui s’étaient étalés les quatre fers en l’air étaient ses ennemis mortels. Elle se familiarisait peu à peu, et osait regarder cet homme terrible, de temps à autre, furtivement. Lui, il la regardait de tous ses yeux, avec un sourire gentil et condescendant, et il n’arrêta de conter ses hauts faits que pour demander, en baissant un peu la voix :

— Eh bien, consentez-vous à venir chez moi, maintenant ?

Line rougit derechef. Pour éviter de répondre, elle osa questionner :

— Alors, c’est vous qui êtes le plus fort de tous ?

— Oui, dit-il, c’est moi… Nous appelons ça le champion.

La petite baissa la tête, émerveillée et confuse. Jamais elle n’oserait… Pensez donc : un champion ! Le champion !

Le vainqueur des boxeurs russes et espagnols reprit d’une voix négligente :

— Malheureusement, je n’ai plus guère l’occasion d’en démolir de nouveaux. Personne n’ose plus se mesurer avec moi. J’ai pourtant lancé un défi de cinq mille francs à celui qui pourrait me porter un coup de poing, un seul ! Mais nul n’a eu le courage de relever ce cartel… Alors, c’est convenu, vous viendrez chez moi demain…