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Théodule


Théodule entra en coup de vent dans le bureau de l’ingénieur Jean Leroy. Les bras dressés vers le plafond, la face hilare, il esquissa une danse sauvage et guerrière, hurla à trois ou quatre reprises : « Elle est bonne ! Elle est bien bonne ! » se précipita pour serrer les mains de son ami, et accrocha au passage un frêle guéridon, sommé d’un joli vase en porcelaine dont les fragments jonchèrent aussitôt le parquet.

— Ça, mon vieux, c’est ta faute ! bougonna Théodule… Pourquoi ne le fourres-tu pas dans un coin, ton guéridon ? On n’ose remuer, chez toi !

— Tu as mon carnet de notes ? demanda Jean.

— Le voici, dit Théodule.

Et fièrement, comme s’il accomplissait une action fort glorieuse, il posa sur le bureau un mince paquet enveloppé de papier gris.

L’ingénieur poussa un grand soupir de soulagement.

— Je pensais bien, dit-il, que toi seul pouvais avoir égaré ce cahier, du moment où il t’était passé par les mains… Toujours distrait, alors ?

— Mais non, mon vieux, je ne suis pas distrait !… Ça m’agace, à la fin, de t’entendre crier ça sur tous les toits… On finira par croire que c’est vrai, si tu le