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Vous dites avoir souffert à cause de moi ? Je suis en même temps désolée et heureuse que vous souffriez à cause de moi. C’est dans la souffrance, mon aimée amie, que l’âme trouve sa plus intime volupté, c’est certain, et c’est quelquefois dur à comprendre ; cependant, c’est la vérité : souffrir pour quelqu’un qu’on aime et aimer malgré tout ce quelqu’un n’est-ce pas le comble de l’amour ? Vous êtes une belle âme, et je suis sûre que vous me comprenez, et c’est pour moi un plaisir indicible de sentir que vous, ma chérie, compreniez mes sentiments, car le commun estime que c’est une folie ; or folie pour folie, je préfère la mienne qui comprend et aime ce que je fais à celle des ignares qui n’ont pas ce sens intime de la psychologie de l’amour et qui, parce qu’il sont aveugles, croient que tout le monde leur ressemble. Oh ! non, je ne suis pas de ces âmes pusillanimes et faibles qui acceptent tout sans combattre : la vie se trouve dans la lutte pour atteindre un idéal ; on est frappé quelquefois, on est blessé, on saigne, on peut mourir des blessures, mais au moins on a la conviction d’avoir lutté, d’avoir exercé les facultés les plus nobles de la nature humaine, les facultés de l’intelligence et de la volonté. Cette multitude d’âmes qui acceptent tout sans s’en rendre compte et qui préfèrent à l’honneur de la lutte le plaisir du repos ; cette multitude dont l’intelligence et la volonté sont les esclaves, les véritables esclaves des idées