Ou si, par hasard, il reste d’eux quelque vague souvenir, ce sera peut-être dans les romanesques rêveries du poëte, qui les prendra pour peupler en imagination ses clairières et ses bosquets, comme les faunes et les satyres, et les divinités des bois, dans l’antiquité. Mais s’il se hasarde à pénétrer dans la sombre histoire de leurs injures et de leurs misères, s’il dit comment ils furent envahis, corrompus, dépouillés, chassés loin de leur abri natal et des tombeaux de leurs pères, traqués en tous lieux comme des bêtes fauves, terrassés et immolés dans une affreuse boucherie, nos descendants détourneront la face de ce récit avec horreur et incrédulité, ou rougiront d’indignation devant la barbarie de leurs aïeux. — « Nous sommes repoussés, repoussés », disait un vieux guerrier, « jusqu’à ce que nous ne puissions reculer davantage ; — nos haches sont brisées, nos arcs sont rompus, nos feux sont presque éteints ; — encore un peu de temps, et l’homme blanc cessera de nous persécuter — car nous aurons cessé d’exister. »
PHILIPPE DE POKANOKET
Bronze monumental, au visage immobile ;
Cœur que la pitié touche et ne rend pas ductile,
Et n’ayant à demi, dès l’arbre son berceau,
Onc senti, bien ou mal, jusques à son tombeau ;
Impassible, craignant — la honte de la crainte ;
Un stoïque des bois, — homme ignorant la plainte.
Il est à regretter que les écrivains qui, les premiers, ont traité de la découverte et de la colonisation de l’Amérique, ne