deux ; et c’est ainsi que les pauvres pèlerins de la forêt ont été persécutés et diffamés, non parce qu’ils étaient coupables, mais parce qu’ils étaient ignorants.
Les droits du sauvage ont rarement été convenablement appréciés ou respectés par l’homme blanc. En temps de paix, il a trop souvent été la dupe d’un adroit trafic ; en temps de guerre, on l’a regardé comme un animal féroce, dont la vie ou la mort était une question de pure précaution, de simple convenance. L’homme est cruellement prodigue de la vie quand sa sûreté à lui est compromise et qu’il s’abrite sous l’impunité, et il n’y a pas grande merci à attendre de lui quand il sent l’aiguillon du reptile et qu’il a conscience de son pouvoir de détruire.
Les mêmes préjugés auxquels on se laissait aller d’abord existent et circulent partout aujourd’hui. Certaines sociétés savantes se sont, avec un zèle digne d’éloges, efforcées, il est vrai, de rechercher et de publier le caractère et les mœurs réels des tribus indiennes ; le gouvernement américain a, dans sa sagesse et son humanité, fait aussi tout son possible pour inculquer un esprit de bienveillance et d’équité à leur égard, et pour les protéger contre la fraude et l’injustice[1]. Mais l’opinion courante sur le caractère indien a trop de pente à se former d’après les misérables hordes qui infestent les frontières et rôdent autour des établissements. Et celles-ci se composent trop communément d’êtres dégénérés, corrompus et affaiblis par les vices de la société, sans avoir bénéficié de sa civilisation. Cette fière indépendance qui formait la principale colonne de la vertu sauvage a été ébranlée et renversée ; tout le système moral gît en ruine. Leurs esprits sont humiliés, abâtardis par le sentiment de leur infériorité, et leur courage natif écrasé, dompté, par le savoir et la puissance supérieurs de leurs voisins civilisés. La société s’est avancée sur eux comme un de ces souffles flétrissants qui respirent parfois la désolation sur toute une étendue de fertilité. Elle
- ↑ Le gouvernement américain a été infatigable dans ses efforts pour améliorer la situation des Indiens, pour introduire parmi eux les arts de la civilisation et les notions civiles et religieuses. Afin de les protéger contre les fraudes des spéculateurs blancs, il est défendu à tout individu de leur acheter des terres ; et personne ne peut en recevoir d’eux à titre de présent sans la ratification expresse du gouvernement. Ces mesures sont strictement observées.