Le vieux manoir de Charlecot et le parc qui l’environne sont encore aujourd’hui en la possession de la famille Lucy, et ils offrent un intérêt particulier en tant que liés à ce bizarre mais fécond épisode de la courte histoire du poëte. Comme la maison ne se trouvait à guère plus de trois milles de distance de Stratford, je résolus d’aller à pied lui rendre une visite, afin de pouvoir m’égarer à mon aise à travers quelques-unes de ces scènes dont Shakspeare doit avoir tiré ses premières conceptions de la nature rustique.
La campagne était encore nue et sans feuilles, mais le paysage anglais est toujours vert, et le changement soudain intervenu dans la température dévoilait une admirable puissance de fécondation. C’était vivifiant et revigorant d’assister à ce réveil du printemps, de sentir sa chaude haleine filtrer peu à peu à travers les sens, de voir la terre, douce et moite, commencer à pousser des bourgeons verts et de frissonnants brins d’herbe ; les arbres et les arbustes donner, dans le renouveau de leurs couleurs et la perce de leurs boutons, la promesse du retour du feuillage et des fleurs. On découvrait la galantine perce-neige, cette petite habitante des confins de l’hiver, avec ses chastes fleurs blanches, dans les petits jardins devant les chaumiè-