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gleterre sont celles qui consistent à répandre des fleurs avant les funérailles, à les planter sur la tombe des amis qui ne sont plus. Ce sont là, dit-on, les vestiges de quelques-uns des rites de l’église primitive ; mais elles remontent à une bien plus haute antiquité, car on les trouve observées chez les Grecs et les Romains, et souvent mentionnées par leurs auteurs. Elles furent, à n’en pas douter, le tribut spontané de l’affection ignorante, et prirent naissance longtemps avant que l’art ne se fût donné pour tâche de moduler la douleur sur la lyre, de la graver sur les monuments. On ne les rencontre plus aujourd’hui que dans les endroits les plus éloignés, les plus retirés du royaume, où la mode et l’esprit d’innovation n’ont point encore pu se précipiter, effacer les intéressantes et curieuses traces du bon vieux temps.

Dans le Glamorganshire, dit-on, le lit sur lequel repose le cadavre est couvert de fleurs, usage auquel fait allusion une des plaintives chansons de la pauvre Ophélie :


Son linceul, aussi blanc que la neige qui tombe,
Est tout jonché de fleurs ;
Gage d’amour sincère, elles couvrent sa tombe…
On a versé des pleurs.


Il est encore une bien belle et bien délicate coutume, observée dans quelques-uns des villages reculés du sud, aux funérailles d’une femme qui est morte jeune, sans avoir été mariée. Une jeune fille, celle qui par l’âge, la taille et les traits se rapproche le plus de la défunte, porte devant le corps une guirlande de fleurs blanches ; on la suspend ensuite dans l’église au-dessus du siége qu’elle occupait. Ces guirlandes sont quelquefois de papier blanc, et imitent les fleurs ; au milieu se trouve généralement une paire de gants blancs. Elles sont considérées comme des emblèmes de la pureté de la défunte ; c’est la couronne de gloire qu’elle a reçue dans le ciel.

Dans quelques parties du royaume aussi, c’est en chantant des psaumes et des hymnes qu’on porte en terre les morts : espèce de triomphe, « pour montrer, dit Bourne, qu’ils sont arrivés avec joie au bout de la carrière, et qu’ils ont obtenu la palme. » Ceci, m’apprend-on, se pratique dans quelques-uns des comtés du