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de Qara-Türgäs les Turghès Noirs, nom qui servirait ainsi à désigner ceux des Turghès qui s’étaient attachés à Sou-lo (Sułuɣ?) khan ? Il est vrai que ces factions ne sont mentionnées que comme ayant trait à la fin du règne de Sou-lo khan ; mais rien n’empêche de supposer qu’elles ont déjà existé antérieurement, ou qu’on a employé ici par anachronisme le nom de cNoirs». (Concernant l’emploi des mots aq, blanc, et qara^ noir, pour distinguer les tribus respectivement dominantes et assujetties, comp. aussi Howorth dans Traoaux de la 5« session du Congrès des Orientalistes, St.-Pétb., 1876, U, p. 142.)

Quant à tabarda, que je n’ai pas traduit, je pense que Tabar est un nom propre du- lieu (naturellement sans désigner le Tabar ou Tabaristan au sud de la mer Caspienne ; car ce dernier pays est trop éloigné ; mais il est possible que ce même nom ait représenté d’autres localités ; comp. Dorn, Caspia, St.-Pétersb. 1875, p. 47, 135, note 1). Comment combler la lacune qui vient après qo- ou qu-f Ce point est obscur. On pourrait, par exemple, imaginer qo[ndurtymyz ; Jana Joryp], «nous établîmes ce peuple à Tabar ; en retournant, etc.» ; mais ce n’est qu’une supposition en l’air. (Radloff regarde tabarda comme une forme verbale de tab-^ trouver [plutôt tap- ; comp. tapa, contre, litt. pour trouver, rencontrer], et traduit par «um dièses Volk aufzufinden» ou p. 124, «bei dem Âuffînden dièses Volkes». Une pareille formation serait pourtant dépourvue d’analogie dans le langage des inscriptions.)

49) [I E 39]. Jinèû-ûgûz, la rivière des Perles, est aussi mentionnée I S 3 — 4 = II N 3. Comme nous le montrent ces trois passages, cette rivière était située au loin dans l’ouest. Les Turcs la passent durant la campagne qu’ils font contre le peuple sogdak, leur vassal (voir note 38), et ils durent la passer avant d’atteindre à la Porte de Fer, leur frontière à l’ouest (note 6). A n’en pas douter, ce ne peut être que la rivière Sogd même, le Zarafchan de nos jours, «celle qui répand de l’or», la même que les Grecs appelaient Polytinietos^ «la précieuse» (Strabon, p. 518). (Radloff, p. 119, sous Jàndû, suppose, mais en hésitant, que ce serait l’Amou-Daria (Oxus), ce qui est impossible ; car ce dernier coule de l’autre côté de la Porte de Fer, vu du côté des- Turcs.) Serait-ce la même rivière dont parle un des fragments chinois du mon. III, sous le nom de Tchen-tchou-ho, «la rivière de la vraie perle», et concernant laquelle M. Devéria présume que Tchentchou est la transcription chinoise d’un nom turc (Inscr. de VOrkhon, p. XXXI, 15, XXXVI, note 17) ? Ce nom contiendrait, pour l’oreille et le sens, Taccommodation du turc Jinèû-ûgûs.

50) [I E 40]. Bisiàà est le datif de bis, nous. Il est hors de doute que la vieille langue turque des inscriptions a eu cette forme particulière de datif, constituée par l’affixe r-/ia,) -/iâ, qui a dû remplacer (-qaj -kâ par l’analogie des autres datifs pronominaux, comme maàa^ à moi, l’affixe de la 3© personne -yàay -iàâ et autres, où c’est, à proprement parler, le thème qui finit en n. Nous retrouvons cette même forme dans I E 19 = II E 16. (Radloff, qui lit ici qyzyha, traduit : «er batte sich an die Tochter eines Helden gemacht» (c.-à-d. il était entré en relation avec la fille d’un héros). Je ne vois pas quel