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le sort successif de tous les ouvrages que j’y ai produits ; ce que j’ai été, ce que je devais être et que je serais, si, au lieu de m’encourager honorablement plus tôt, on ne m’avait pas toujours écrasé. Je t’enverrais cette lettre tout entière, mais je crains de faire un trop gros paquet que je pourrais à la vérité affranchir, mais que je n’ose risquer, n’étant pas sûr qu’il t’arrive. Enfin, le tout est écrit, comme ce fragment. Dis-m’en ton sentiment et juge, par le caractère de celui à qui je voulais l’adresser, si je ferais bien de le faire encore, oui ou non. J’avais pensé qu’étant pour moi un compatriote et un illustre protecteur, je devais me faire connaître ainsi à M. Portai.

Quoiqu’il en soit, je suis très décidé à faire le tableau de l’Assomption. Fais la dernière démarche auprès du Préfet, à qui, par ton conseil, j’écris en lui exposant les observations que tu m’as conseillé de faire sur cette composition, pour ne peindre que la seule Assomption et lui rappeler combien est modique la somme de trois mille francs, dont les frais seuls emportent déjà le tiers. Mais, jaloux de me faire honneur dans le berceau natal, je n’ai garde de ne pas profiter de l’occasion ; et je suis décidé, malgré tout, à battre au Salon le fer tandis qu’il est chaud, et à combattre avec de beaux ouvrages jusques à la fin. J’espère avoir terminé pour le Salon prochain. Je donne au tableau la proportion que l’on m’a envoyée, 14 pieds sur 8. Il n’en sera que plus beau, et je compte dessus. Combien je regrette que tu ne sois pas ici, à le voir faire !