Page:Ingres d’après une correspondance inédite, éd. d’Agen, 1909.djvu/82

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 70 —

que ambition est de leur ressembler et de continuer l’art en le reprenant où ils l’ont laissé. Je suis donc un conservateur des bonnes doctrines, et non un novateur. Je ne suis pas, non plus, comme le prétendent mes détracteurs, un servile imitateur des écoles du XIII e et du XIV e siècles, quoique je sache m’en servir avec plus de fruit qu’ils ne savent le voir. Virgile sut trouver des perles dans le fumier d’Ennius. Oui, dût-on m’accuser de fanatisme pour Raphaël et son siècle, je n’aurai jamais de modestie que devant la nature et leurs chefs-d’œuvre. Mes pas et mes progrès dans la carrière, je les dois uniquement à mes études constantes et approfondies des beautés classiques de ces législateurs de l’art. Leurs successeurs ne m’ont rien appris que de vicieux et que je n’aie dû oublier. »

Ceci est le fragment d’une très longue épître que j’ai écrite et que je voulais adresser à M. Portai, ministre et membre de la Commission, qui a demandé, pour moi, le tableau que je vais peindre pour notre cathédrale. Je la fis dans l’excès de ma sensibilité, lorsque, victime toujours de mes ennemis secrets et ouverts, on m’a alloué un tableau de trois mille francs, d’abord, et non un tableau de premier ordre dont un plus haut prix honore déjà l’artiste qui en est chargé. Et, pour mieux faire entendre et soutenir mes prétentions et sa protection vengeresse que je lui demandais en cette occasion, je lui présentais l’histoire de ma vie à l’époque de mon départ pour Rome, et