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chenets de cuivre. Et vous regardez encore vers les portraits des amis, dont aucun ne survit aujourd’hui. Vous regardez vers le violon, qui fait aussi silence. Non, M. Ingres n’est plus ici. Voici seulement la place où l’octogénaire peignait la Jeunesse, sous les traits de la Source ; et, du maître disparu, il ne nous reste que ces deux billets qu’on va lire :

« Ce jourd’hui, 14 janvier 1865. à 1 h. du matin, est décédé, en son domicile, quai Voltaire, 11, Jean-Auguste-Dominique Ingres, peintre d’histoire, Sénateur, Membre de l’Institut, Grand Officier de la Légion d’Honneur, âgé de 86 ans, né à Montauban (Tarn-et-Garonne) marié à Delphine Ramel.

« Le décès a été constaté, suivant la loi, par nous, etc. » (Extrait des actes de décès de la VIIe Mairie de Paris).

TÉLÉGRAMME
Paris, de Montauban, 248.76, 15, 4, 50
Madame Veuve Ingres, 11, quai Voltaire, Paris.

« Au nom de la Ville de Montauban et de mon personnel, je viens, Madame, vous offrir l’expression de la plus profonde sympathie. La France perd dans M. Ingres le plus illustre représentant de l’École française et de l’Art moderne. Nous pleurons, de plus, ici, dans un deuil de famille, le digne concitoyen et compatriote aimé. Recevez, Madame, l’hommage de mon profond respect.

Prax-Paris. »

Par une blanche et glaciale journée d’hiver, ce qui restait de Jean-Auguste-Dominique Ingres, accompagné de ce qui vivait encore de sa génération décimée, fut porté à ce même cimetière du Père-La chaise où l’on se souvient que, depuis Daunou, il avait enterré tant de contemporains rivaux d’une gloire qu’il aurait voulue pour lui seul. Cette journée de janvier fut pourtant moins