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LXXXII
4 juin 1862.

Mon cher Cambon, je suis si ébahi de ma nouvelle position, que je ne sais où donner de la tête. Je suis obligé de correspondre a tant de souhaits, à des empressements de félicitations si générales qu’elles s’étendent à presque tout Paris, départements et étranger. Si je n’avais dans Madame Ingres un parfait secrétaire, (c’est une femme si courageuse et si attachée à l’existence de son mari), je ne sais ce que je deviendrais au milieu de toute ma gloire, puisqu’il faut dire ainsi. Mais vous, qui me connaissez assez, vous jugez bien que, de tout cela, je ne prends que ce qui me convient et que je suis encore plus artiste que jamais.

Cependant je suis, comme vous devez bien le penser, bien reconnaissant de tout ce qu’on fait pour moi. L’Empereur a voulu, de lui-même, proclamer et prononcer mon nom ; il a bien voulu verser des fleurs honorables sur la vieillesse de mes derniers jours. Nous étions, ma femme et moi, bien loin de penser que, dans l’espace d’une semaine, je serais introduit à prêter serment et à recevoir, dans ce lieu suprême, la plus tendre et la plus honorable distinction.

Tout cela nous prouve cependant, mon ami, que, allant droit son chemin, avec des convictions d’art indispensables, courage et fermeté