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Ce brave Cambon est bien le plus malheureux des hommes. Il a été, de nouveau, la victime du jury, ce même jury qui l’a victime au concours du Prix de Rome. Je puis bien Rassurer qu’il n’a en rien mérité d’être traité ainsi. Son talent est vraiment distingué et dans une bonne route. J’en gémis, mais je ne peux que protester inutilement contre de pareilles atrocités. Mais ils sont les plus forts et les plus nombreux ; ils s’entendent, comme larrons en foire, et ma seule voix et mes œuvres et mon nom, rien n’y fait. Lorsqu’ils sont assis dans leurs fauteuils académiques, il n’y a pas de puissance qui puisse intervenir, il n’y a pas d’appel à leurs iniques et frauduleux jugements. Il faut du courage pour avaler cette lie, la même que tu nous a vu avaler si longtemps. Les hommes sont toujours méchants, envieux et ignorants.


À M. Marcotte.
Dampierre, 8 août 1847.

À Paris, l’on compterait presque les jours où l’on se voit, et ce n’est pas ainsi que l’on devrait vivre avec ses amis ; mais c’est cette peinture qui, pour assez peu ou, si vous voulez, pour trop de jouissances, m’enlève tant de temps que je devrais consacrer aux amitiés, en vivant enfin humainement, comme il faudrait. Cette tyrannie cruelle m’empêche même de dormir, tant elle veut régner seule, sans partage, et il faut voir comme elle s’en donne à Dampierre ! Elle ne me permet pas d’abord la plus petite promenade, même autour du château, ou c’est bien rare. Aussitôt levé, à Tout rage ! Prépare tes