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silence sur ta chère fille, qu’elle ne fasse pas partie de ce voyage. Songe bien que tu nous ferais beaucoup de peine. Quoi donc ? Eh ! qui empêcherait qu’elle ne vînt ? Le voyage est un peu fatigant ; mais arrivée ici, elle sera comme chez elle et les soins, comme tu penses bien, ne lui manqueront pas. Tu l’auras à côté de toi et de nous. Ce nous ferait un véritable chagrin, si tu décidais autrement et ma femme ne s’en consolerait pas, tant elle porte d’intérêt à cette enfant. Mon ami, tâche de nous contenter sur ce point.

Enfin, nous t’aurons ! Et tu arrives bien. J’espère avoir fini mon Duc d’Orléans, pour ton arrivée et tu verras le Salon. Tu sauras que mon portrait de Cherubini et la Muse occupe tous les esprits curieux d’art. Il paraît que cet ouvrage ne le cède pas aux autres… Je ne t’en dis pas davantage, il vaut mieux t’en laisser la vue vierge.

Il est donc vrai, mon bien cher, que nous nous embrasserons bientôt et pour tout de bon. Y a-t-il assez longtemps que nous ne nous sommes vus, et faut-il que de si bons amis vivent continuellement séparés l’un de l’autre ? Que de choses à se dire et par où commencer ? Tu pourras aussi entendre quelques beaux concerts du Conservatoire où Beethoven est divinisé. Tu fais toujours de la musique, moi aussi. Et tant mieux ! Nous en ferons chez nous, j’espère ; j’ai de bons pianistes qui ne demandent pas mieux. Mlle Granger est devenue une des premières pianistes de Paris : jeune et jolie et bonne et digne demoiselle, elle