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J’ai été assez heureux pour que M. Dugasseau, mon élève et mon ami aussi, ait tenu à vous l’apporter et à en avoir un soin tout tendre, pendant le voyage. Je vous recommande aux meilleurs titres cet excellent jeune homme, pour son caractère, son talent, son instruction et pour tout l’attachement qu’il me porte. Il vous dira bien des choses de ce tableau et de moi ; mais, malgré tout, jamais assez pour tout ce que je sens, pour vous, de profonde amitié et de reconnaissance.

Quoique j’ignore tout à fait comment ce tableau sera exposé privément, pour le montrer à mes seuls amis, si c’est le bon plaisir du prince, je voudrais qu’il fut placé droit, point penché en avant sur son chevalet, et rien autre chose que bien lavé et avec ses ombres. Le cadre est déjà fait. Sera-t-il bien large et bien beau ?… (Op. cit.)

J. Ingres.

Juillet 1840.

… Sans vous parler trop de lui à vous surtout qui le voyez, ce cher tableau, je me suis efforcé d’en cacher toute la peine. Ai-je réussi ? C’est ce que votre première lettre m’annoncera. En attendant, croyez-le bien, si j’avais le bonheur de vous voir lui sourire en l’approuvant dans son ensemble, je serais cent fois heureux et sûr du reste.

Mieux avisé, quatre jours après le départ du tableau, j’ai écrit à mon brave Raymond qu’il eût à le vernir avec toutes les précautions que je lui ai indiquées. Mais j’ai oublié de lui recommander, (pardon de toutes ces tendresses), de lui faire prendre un repos de deux jours, à l’air, auprès d’une fenêtre. Car, indubitablement, enfermé tout frais, (je travaillais encore une heure avant l’encaissement), puis, privé d’air, il a dû vous arriver