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aucune espèce de catalogue historique des portraits ni du reste. Et voici mes raisons : ces portraits n’ont point été peints, comme vous le savez, sur la nature. Ils sont cependant ressemblants, mais autant par la tournure que par l’exactitude des traits, ils ne le sont à la lettre que lorsqu’on les trouve. Mais si j’allais dire, moi, qu’ils le sont et les donner pour tels, on me dirait peut-être que non. Ne promettant rien, je tiendrai tout. Je vous prie d’intituler le tableau, au livret du Salon : Vue intérieure de la Chapelle Sixtine : le Pape Pie VII y tient Chapelle. Quand au tapis vert de la Chapelle, je crois que vous avez raison…

Je suis fâche que mon petit tableau, l’Épée de Henri IV, ne vous ait pas plu… Mais je me défendrai sur tous les points. Car ce tableau est vrai de dessin et de pantomime, pur dans les détails, avec des figures bien proportionnées et un goût dans les ajustements très recherché. Tous ceux qui l’ont vu ici ont trouvé, et moi aussi, qu’il était d’une couleur vraie et forte, et qu’il tenait beaucoup de l’école vénitienne, à laquelle je penserai toujours lorsque je peindrai. Il est peint très précieusement et finement soigné dans tous les détails, mais non d’un fini à la Gérard Dow : genre d’exécution ennuyeux, point estimé des peintres de l’école italienne, ni même des excellents Flamands, dont vous me citez avec raison les ouvrages. Les ouvrages les plus habiles de ceux-ci sont ceux des Téniers, qui ne sont que touchés, mais qui sont beaux en ce que la touche est juste à sa place et mise avec sentiment.

Je vous citerai ensuite Metzu, qui est, par excellence, fort et doux dans sa touche, et tant d’autres. Je vous prie, après cela, de me dire si un fini comme celui de Gérard Dow n’est pas insipide et inutile. Je suis bien loin, certes, d’égaler ces grands peintres, que je prendrai toujours pour modèles ; mais je crois que, pour l’exécution, mon tableau a quelque mine de les rappeler, sans parler de ce