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« C’est pour ces motifs que je me suis décidé à faire entendre le premier acte de Tristan et Yseult aux habitués de mes séances musicales. Si cet essai réussit, comme j’ai lieu de l’espérer, je me propose de poursuivre l’expérience et de faire connaître successivement les grandes compositions d’un maître, dont on a pu discuter les réformes audacieuses, mais dont tout le monde, aujourd’hui, s’accorde à reconnaître l’incontestable génie. »

Nous partageons entièrement l’opinion de Charles Lamoureux et nous estimons que les auditions au concert des œuvres de Richard Wagner, malgré leur côté imparfait, eu égard à leur séparation du cadre où elles devraient être enchâssées, ont eu pour résultat d’habituer le public à la phraséologie wagnérienne.

La preuve en est que l’on est arrivé à accepter des pages qui, autrefois, dans l’enceinte des Concerts populaires, avaient soulevé de terribles tempêtes et que l’audition du premier acte de Tristan et Yseult n’aurait pas été accueillie aussi favorablement au théâtre du Château-d’Eau, si les auditeurs n’y avaient été préparés par l’étude des premières pages du maître. C’est ainsi que nous verrons plus tard Lohengrin réussir soit à l’Éden, soit à l’Opéra, alors que Tannhæuser avait échoué, le 13 mars 1861, dans cette dernière enceinte, faute d’une initiation suffisante. Nous savons qu’on objectera, non sans raison, que la cabale avait joué un rôle important dans la chute de Tannhæuser à l’Opéra ; mais nous croyons aussi que, si le public musicien d’alors avait été mieux préparé à l’intelligence de cette belle œuvre, il aurait fini par imposer silence aux détracteurs de parti pris.

L’exécution du premier acte de Tristan et Yseult était un acte d’audace, qui fut couronné de succès. L’interprétation avait été excellente grâce à la vaillance