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applaudissements. C’était un grand pas fait pour l’acclimatation de l’oratorio en France.

Charles Lamoureux donna plusieurs auditions du Messie ; puis il fit entendre la Passion selon saint Matthieu, oratorio pour soli, deux chœurs et deux orchestres de Jean-Sébastien Bach [1]. Cette œuvre grandiose, qui fut exécutée pour la première fois le Vendredi-Saint de l’année 1729 à l’église Saint-Thomas de Leipzig, n’avait jamais été entendue, dans son ensemble, en France. Nous assistions aux auditions de cette maîtresse page, données par Lamoureux les 31 mars, 2 et 4 avril 1874, et nous pûmes constater l’effet immense qu’elles produisirent sur le public. On admira le calme solennel qui règne dans la première partie et le mouvement passionné qui distingue la seconde, — la merveilleuse orchestration de l’œuvre qui, selon la poétique expression de Hiller, « ressemble à un beau voile d’une grande finesse, derrière lequel reluit un visage noble, mais arrosé de larmes [2] ».

Puis se succédèrent, avec un succès égal, le Judas Machabée de Hændel, la cantate Gallia de Charles Gounod et Ève, mystère en trois parties de Massenet.

Malgré l’intérêt que prit le public à ces nouvelles et intéressantes exécutions, les frais immenses qu’elles entraînèrent ne permirent pas à Charles Lamoureux de les continuer. Il faudrait en France une autre impulsion que celle d’un seul artiste, tant soient grands son mérite et sa persévérance, pour implanter à tout jamais sur notre sol ces merveilleuses espèces de la flore primitive. Nous

  1. Le texte de la Passion selon saint Matthieu est de Henrici (Christian-Frédéric), plus connu sous le pseudonyme de Picander.
  2. Les solistes étaient : Mlles Armandi, Arnaud, Puisais, MM. Auguez, Vergnet, Dufriche, Miquel, Mouret, Jolivet, Couturier.