Page:Imbert - Portraits et Études, 1894.djvu/22

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

toujours lutte inégale et que l’épanouissement de l’une entraîne presque toujours l’annihilation de l’autre. Cette théorie est extrême : l’union de la science et de la poésie, en musique comme dans telle autre branche de l’art, est nécessaire ; elle est une condition expresse de l’éclosion parfaite et de l’ascension du génie. Mais il ne faut pas que la première absorbe presque entièrement la seconde. Le propre de l’esprit poétique est de représenter, d’évoquer d’une manière vivante et colorée les phénomènes que la science ne peut traduire que par des formules. C’est probablement parce qu’il n’y a pas eu dans le cerveau de César Franck pondération exacte entre l’élément scientifique et l’élément poétique, entre la formule et le rêve, que l’on perçoit dans ses compositions des tendances plus marquées pour les procédés harmoniques que pour les idées mélodiques. Ce n’est pas affirmer que le don de la mélodie n’existait pas chez lui ; maintes pages de son œuvre fournissent la preuve du contraire. Mais, affectionnant le contrepoint, visant à l’originalité harmonique, la prépondérance du côté scientifique devait se faire tout particulièrement sentir dans ses compositions.

Ce fut un modeste, un désintéressé, un dévoué, un laborieux que César Franck. Aussi sa vie est-elle peu remplie de faits, d’anecdotes, mais entièrement vouée à l’idée.

Né le 10 décembre 1822 à Liège en Belgique[1], il fit ses premières études au Conservatoire de cette ville.

  1. Ses premières compositions sont ainsi signées : « César-Auguste Franck de Liège ».