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une fois de plus que, si Robert Schumann nous a donné, au point de vue musical, une si fidèle et poétique traduction de l’œuvre de Gœthe, c’est qu’aussi bien que le poète de Francfort, il a été un des représentants les plus autorisés de la grande famille allemande et que tous les deux se retrouvent dans un trait commun : l’amour de la nature et le culte de la poésie mêlée à celui de la philosophie.

Comme Gœthe, Schumann a donc entrevu Faust au delà du tombeau. La scène se passe dans les régions idéales et éthérées, où les anges, flottant dans une atmosphère supérieure, transporteront la partie immortelle de Faust, qui sera accueillie par la pécheresse nommée autrefois Gretchen. C’est une ascension vers le Féminin Éternel, qui nous attire au ciel [1].

Le début est admirable. Au milieu des montagnes, des rochers, des forêts, dans une profonde solitude vivent de pieux anachorètes dispersés dans les crevasses des rochers. Toute cette nature sauvage s’animera à leur voix. « On prêtera l’oreille aux grandes voix de la solitude, recueillies par Robert Schumann dans le prélude instrumental qui est suivi du chœur de saints anachorètes, à ces voix dont les rumeurs indéterminées se mêleront à ce chœur lui-même, sous la forme de sourds battements d’orchestre. Tout l’effet de ce court et austère prologue consiste en une succession de notes tour à tour portées l’une vers l’autre, soit en franchissant les larges intervalles de la sixte et de l’octave, soit pour se toucher à

  1. La partie immortelle de Faust, avant d’atteindre le ciel, où il sera reçu grâce à l’intercession de l’Éternel Féminin, traversera toutes les phases de purification. Aussi ne peut-on aborder cette dernière partie du Faust de Gœthe, sans penser aussitôt à la divine Comédie de Dante.