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mon œuvre est belle ! » Et l’orchestre achève dans un tutti vigoureux cette merveilleuse péroraison que traverse un souffle de haute envolée.

— La « grande cour du Palais » tel est le titre de la scène, dans laquelle Gœthe a mis fin à la vie terrestre de son héros. Schumann en a fait la scène VI de sa partition, la conclusion de sa deuxième partie, sous la dénomination de « Mort de Faust ».

Devant le grand vestibule du palais, Méphistophélès appelle à lui les Lemures, spectres familiers, sorte de revenants auxquels l’antiquité donnait l’apparence de squelettes et qui, au moyen âge, formaient les Esprits de l’air. Avec quelques appels de trompettes et de trombones, soutenus par des triolets d’un mouvement rapide, Schumann évoque ces fantômes, et il a voulu que les parties d’alto et de ténor fussent chantées par des voix d’enfants, afin que le contraste fût plus frappant et la sonorité des timbres plus étrange. Le chœur des Lemures, creusant avec des gestes bizarres, sur l’ordre de Méphistophélès, la fosse destinée à contenir la dépouille mortelle de Faust, est une sorte de complainte, empreinte de tristesse, soutenue à l’orchestre par un accompagnement imitatif. L’apparition de Faust, sur les degrés de son palais, cherchant à se guider entre les piliers de la porte, est d’un effet saisissant ; le compositeur, en employant la sonorité mystérieuse et un peu féerique des cors, a donné à cette page une impression de grandeur qui ne fait que s’accroître jusqu’au moment où Faust tombera entre les bras des spectres qui le coucheront sur le sol. Bercé par les illusions, malgré l’ironie implacable de Méphistophélès, il entend avec transport le cliquetis des bêches. C’est la multitude qui travaille pour lui ; son