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professe est celui de la création, l’amour poussé jusqu’au fanatisme des grandes puissances primordiales. Il personnifie bien à lui seul l’esprit d’outre-Rhin, que le poète Henri Heine dépeignait ainsi : « Le panthéisme est la religion occulte de l’Allemagne ».

Après avoir calmé l’âme inquiète de Faust, il le met, à son réveil, en présence de toutes les beautés de l’aube étalant ses divines colorations à l’horizon. Le soleil commence à éclairer la cime des montagnes. « Salut, nouveau matin ! » s’écrie Faust. Et l’orchestre de Schumann, dans lequel les altos et les violoncelles jouent les rôles principaux, suit la pensée du poète et la souligne. Sur les mots : « Ô splendeurs ! » les trémolos, mêles aux appels des instruments à vent, et avec une progression dans les basses, soutiennent la voix de Faust annonçant le lever du soleil, et en célébrant les beautés dans un véritable cantique d’action de grâces. Mais les rayons trop vifs l’aveuglent ; il en détourne les yeux éblouis. Repris de ses angoisses, de ses désespérances, il se demande si cette lumière est l’amour ou la haine. Schumann a su revêtir d’un profond sentiment de tristesse la pensée du poète, et, sur cette phrase : « Telle est la vie brillante ou désolée », il amène une suspension que prolonge de longs accords indiqués pianissimo pour terminer par un appel brillant au soleil de flamme.

Voilà Minuit (Mitternacht) ! Quatre vieilles femmes vêtues de gris s’avancent vers le Palais, où Faust, chargé d’années et de gloire, ne rêve plus maintenant qu’aux grands problèmes économiques. Les quatre fantômes sont la Détresse, la Dette, le Souci, la Nécessité. La nuit est noire ; les nuages filent à l’horizon et les étoiles disparaissent. Schumann a donné à cette scène un caractère