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Pianissimo et dans un mouvement un peu plus animé les Elfes célèbrent les douceurs, les splendeurs de la nuit, l’heure du mystère, la blanche étoile brillant au firmament, la voûte céleste resplendissant sous le scintillement des diamants qui l’illuminent. Leur chant s’accentue et devient presque triomphal lorsqu’au changement de mesure (6/8), ils rappellent que :

« Les vallées sont plus vertes Sous la fraîcheur de la nuit. »

C’est un véritable hymne à la nature en repos. La phrase musicale s’étage par progressions successives sur les vers :

« Les moissons dans les vallées Cèdent au baiser du vent. »

Mais le jour va paraître et toute la théorie légère s’écrie : « Ah !... voyez..... C’est le jour nouveau ». Les trompettes sonnent. Quelle aube éblouissante ! Quel cri strident est celui d’Ariel annonçant le réveil de la nature ! L’orchestre, avec ses trémolos, introduits avec une certaine discrétion dans les œuvres de Schumann, et l’appel des trompettes, s’épanouit avec une ampleur magistrale. Puis, dans une phrase courte, qui a toute la grâce d’un lied printanier, Ariel engage les Sylphes à se glisser doucement dans la fleur à peine éclose, couverte de rosée et à fuir la lumière du jour bruyant.

C’est toujours à la nature que revient sans cesse le panthéiste Gœthe ; son âme est en communion constante avec elle. En véritable fils de Rousseau [1], le culte qu’il

  1. Gœthe écrivait de Naples, le 17 mars 1787 : « Je pense souvent à Rousseau, à ses plaintes, à son hypocondrie, et je comprends qu’une aussi belle organisation ait été si misérablement tourmentée. Si je ne me sentais un tel amour pour toutes les choses de la nature, si je ne voyais, au milieu de la confusion apparente, tant d’observations s’assimiler et se classer, moi-même souvent je me croirais fou. »